10/09/2013
Les défunts vont bien, eux
Il y a eu un avant, et un après. Avant la mort, après la mort. Avant, une maison douillette, où la défunte vivait une vie discrète, abritée. Après, la charpie. Rien ne pressait, pourtant. Mais si, il y avait urgence. La curiosité, l'envie, l'irrespect n'attendent pas. Quelqu'un, contraint à repartir rapidement, a dit : tout ces placards que je n'ai pas ouvert !... Une main autoritaire a protégé les lettres personnelles, vieilles de 70 ans, les a scellées dans une enveloppe, et a écrit : ne pas ouvrir. Les lettres d'amour conservées avec soin par la défunte ne seront pas lues avant longtemps. Ainsi-soit-il. La maison a été fermée, quelqu'un passera prendre des plantes, dans quelques jours. Il faudra revenir, achever le travail si mal commencé. Tout le monde le sait : nous sommes peu de choses ici bas. Inutile de thésauriser. Rien dans la tombe, un peu chez les héritiers, le reste à la benne. Dans tout ça, peu d'émotions. Une petite fille de 6 ans pleure à chaudes larmes son arrière grand-mère, ayant compris qu'elle ne la reverrait plus. La main autoritaire a rangé dans une boîte quelques papiers, les rares bijoux démodés et sans grande valeur, les lettres mises au secret, les missels, une montre cassée. Maintenant, il ne reste que les regrets : de ce qui a eu lieu, de ce qui n'a pas eu lieu. Seul l'esprit au travail permettra réparation. Il paraît que pour savoir qui l'on est, il faut savoir d'où l'on vient. Les autels des ancêtres ont du sens, leur mémoire honorée, malgré le pillage des placards, l'avidité des mains fouineuses. Peut-être fallait-il voir cette destruction pour comprendre l'essentiel : la vie est ailleurs.
08:18 Publié dans Chronique sans faits divers | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
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