01/10/2012
La vie pas douce
Comment rendre douce une vie qui ne l'était pas naturellement ? Le quotidien était rude, pénible. Travail de force, à l'extérieur, par tous les temps, à une époque où les vêtements n'étaient pas imperméables et étaient longs à sécher. Les hommes se blessaient souvent, surtout aux mains. Ma mère conservait sa pharmacie de première urgence dans le buffet de la cuisine (porte du haut, à droite...) et savait retirer les grosses échardes avec adresse, à l'aide d'une aiguille flambée. Mais les panaris et furoncles guérissaient lentement, malgré les bains d'eau chaude javelisée. Soins sommaires. Mais alors, tout dans la vie était précaire, même si les enfants ne s'en rendaient pas compte. Le transport des grumes, qui fut l'un des métiers de mon père et de mon frère (avec le bûcheronnage), était irrégulier, dépendant de la météo, des coupes de bois et de l'état du camion, qu'il fallait réparer la nuit pour être à pied d'oeuvre le lendemain, sur des chantiers impossibles, perdus dans la montagne, que tout le monde refusait, mais pas eux. L'odeur du cambouis, dans le froid du garage "d'en-haut", les chocs des outils sur le sol cimenté, les voix assourdies dans la fosse, sous le châssis. Et la colère, impuissante, lorsqu'ils ne pouvaient effectuer la réparation, faute de pièces. L'univers des adultes parvient aux enfants de manière lointaine. Ils avaient une vie rude, mais je n'en percevais que des bribes, sans pouvoir relier entre eux ces divers éléments : les vêtements mouillés, les mains douloureuses, l'odeur du cambouis, c'était normal. Ils ne se plaignaient jamais, ni eux qui subissaient les intempéries et les dangers des piles de grumes glissantes, ni ma mère qui attendait leur retour, la soupe chaude prête à être servie, le seul réconfort qu'elle pouvait apporter à ces hommes exténués, si courageux, prêts à repartir à l'aube le lendemain, sans remettre en question leur vie de labeur. Non, la vie n'était pas douce, et rien ne pouvait l'adoucir, sauf cette petite pharmacie qui permettait d'éviter le pire, la soupe chaude et les vêtements secs.
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30/09/2012
Petite philosophie de rien...
Considérer avec attention ce que l'on pourrait appeler son trésor de guerre. Le peu que l'on a sauvé de sa vie, souvenirs, petites histoires, objets, photographies. Certains font fructifier ce petit capital : parce qu'ils savent d'où ils viennent, ils savent où ils vont. Ce n'est pas donné à tout le monde que de pouvoir retracer une histoire, nommer ses ancêtres, démêler le fouillis des événements familiaux, tellement confus. Le passé éclaire le présent. Mais cette lumière est plus ou moins vive selon ce que l'on connaît de ceux qui nous ont précédés, ou selon que l'on a été choyé ou repoussé dans l'enfance. Les événements d'autrefois continuent à nous porter, après nous avoir façonné. Mais combien d'entre nous traversent leur propre vie à l'aveugle, ne soupçonnant même pas de quel secours pourrait leur être cette appropriation de leur histoire ?
07:48 Publié dans Chronique sans faits divers | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
29/09/2012
La vie...
Coups de griffes, à défaut de caresses. La vie n'est pas souvent tendre. Il faut se débrouiller avec ça, la sécheresse du quotidien, ses aspérités, l'absence de perspective. Tout de même, creuser un peu derrière les apparences, pour trouver le puits de lumière dont on a besoin. Creuser sans relâche, pour être un jour récompensé, comme les enfants du laboureur.
08:04 Publié dans Chronique sans faits divers | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
28/09/2012
La nuit
Le vent s'est levé dans la nuit, en même temps qu'une forte pluie. Dans le lit subitement glacé, j'écoute ronfler le tonnerre.
08:03 Publié dans Chronique sans faits divers | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer