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27/05/2012

Bienveillance

"Se retrancher dans la forteresse de la vie privée", selon les mots que j'emprunte à Julius Margolin (Voyage au pays des Ze-ka), en les détournant de leur contexte, est une tentation permanente, mais erronée. La vie privée est aussi fragile et exposée que la vie publique, et il ne se passe guère de jour sans que grincements, frottements, déceptions ne viennent amocher ce que l'on croyait protégé. Il faut sans cesse travailler à retrouver l'harmonie, malmenée par la malveillance, ou peut-être la fatigue, ou l'envie. Sans doute faudrait-il faire tomber les murs des forteresses et apaiser les regards. Les graines de la discorde sont si fines qu'elles se glissent dans le moindre interstice et vont former, très vite, les véritables murailles de nos forteresses personnelles. Le repli sur soi est une tentation, bien que l'on sache qu'il n'existe pas de protection contre les tempêtes des relations humaines, qui pourtant ne sont pas inévitables. Il faudrait "juste" bannir la malveillance, et lui préférer la bienveillance. Laisser de côté l'ironie, et ne pratiquer l'humour que sur soi, etc... De toute évidence, ce programme de perfection est impossible à mettre en œuvre, ni dans sa totalité ni même en partie. C'est seulement une aspiration, un souhait, un vœu, un désir, que sais-je ! Ce vers quoi on tend, par amour, ou simplement par désir d'être bien. Désir légitime d'harmonie et de paix. L'incompréhensible est là : pourquoi continuer à donner (et recevoir) des coups de griffes ? Les conflits font couler plus d'encre que la paix dans les familles et entre les peuples...

26/05/2012

L'oiseau vert du jardin

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24/05/2012

Les territoires du livre

Deux nouvelles dans la presse de ce 23 mai 2012 : la première est liée à l'économie. Gallimard rachèterait, selon toutes probabilités, Flammarion. Concentrons, encore et toujours. Mieux vaut sans doute Gallimard qu'un quelconque fonds de pension qui ne l'aurait pas gardé longtemps... La seconde est beaucoup plus émouvante : on vient de découvrir à Moscou une bibliothèque de 30000 documents, cachée derrière un faux mur du Musée polytechnique. Qui a pris soin de cacher ces livres, en 1917, pour les protéger, sans aucun doute, qui a rangé (entassé) ces milliers de documents, pour les sauver d'une destruction possible, ou jugée probable à ce moment-là ? Et j'imagine l'étonnement de ceux qui étaient chargés de la rénovation du bâtiment en démolissant le mur, et l'émotion des bibliothécaires qui ont posé, pour la première fois depuis des décennies, des yeux humains, et des mains humaines, sur ce trésor assoupi dans l'obscurité, soudain exhumé... Un peu comme les archéologues en Égypte ouvrant le tombeau du pharaon. 5 lignes dans la presse seulement sur l'événement, mais dans mon imagination, une ouverture sur le monde infini de l'histoire de la pensée et des civilisations et le monde tout aussi infini de  l'histoire des livres.

23/05/2012

Écorces, de G. Didi-Huberman

Écorces, de Georges Didi-Huberman (ed. de Minuit), est un livre mince par le nombre de pages, mais important et profond.

La 4ème de couverture nous informe que "c'est le simple récit-photo d'une déambulation à Auschwitz-Birkenau en Juin 2011". La littérature est puissante : 71 pages seulement pour parler de "l'inimaginable" qu'il faut imaginer malgré tout "pour en figurer quelque chose au moins, au minimum de ce que nous pouvons en savoir" (p.30). Après avoir cité Walter Benjamin et ses propos sur l'archéologie, l'auteur nous dit "je ne prétends pas, en regardant ce sol (il s'agit des seuls restes architecturaux du Crématoire V) faire émerger tout ce qu'il cache. J'interroge seulement les couches du temps qu'il m'aura fallu traverser auparavant pour parvenir jusqu'à lui. Et pour qu'il vienne rejoindre, ici-même, le mouvement -l'inquiétude- de mon propre présent" (p.65). Il nous amène à réfléchir à notre point de vue, notre façon de voir des lieux, des bâtiments, des photographies. Par sa voix, nous effectuons avec lui cette visite de Birkenau. Une question vient forcément à l'esprit : Ces lieux de mémoire survivront-ils (et comment ?) à l'effacement des mémoires humaines ? Dans 100 ans, 200 ans, quelle perception de cet inimaginable, qu'il faut pourtant imaginer, auront nos descendants ?

Dans ce "récit-photo", les photos en noir et blanc (en gris, plutôt) ne sont pas de belles photos, esthétiques et brillantes, faites pour plaire. Mais elles sont essentielles, parce qu'elles sont nécessaires à la démarche de l'auteur, jusqu'à évoquer celles prises par des prisonniers eux-mêmes, en août 44, "seuls témoignages visuels d'une opération de gazage dans le temps même de son déroulement" (p.46). 19 courts chapitres, partant des écorces des bouleaux de Birkenau, pour y revenir à la fin : " que suis-je allé faire à Birkenau ?... J'ai traversé le bois de bouleaux tout projet suspendu... totalement sollicité par la violence du lieu"... (p. 69), violence qu'il nous fait partager, dans une grande économie de moyens, par la seule force de l'écriture.