Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

07/08/2012

Comment j'ai vidé la maison de mes parents, de Lydia Flem

Comment j'ai vidé la maison de mes parents, Lydia Flem, Seuil, 2004

 

Depuis 6 ans, ce livre m'attendait sur ma table. Je l'avais acheté à cause du titre. Vider la maison de mes parents est justement ce à quoi je ne suis jamais parvenue. J'attendais, en somme, de ce livre, une leçon de rattrapage. Sauf que je ne me suis pas résolue à l'ouvrir, jusqu'à ces jours derniers, où je me suis opportunément trouvée en panne de lecture. Je ne regrette pas mon retard. Je déguste avec encore plus de plaisir ces pages qui m'attendaient depuis 6 ans. Dès les premiers mots "à tout âge, on se découvre un jour orphelin de père et de mère" jusqu'aux derniers "je n'ai pas envie de mettre un point final à ce livre", on parcourt avec l'auteur ce chemin ouvert par la mort de ses parents, à 2 ans d'intervalle. Un récit à voix retenue, feutrée, sans grandiloquence, qui parle de deuils, du trouble dans lequel ces morts nous laissent et de la légitimité des héritages et des donations. De l'impudeur qu'il y a à ouvrir des tiroirs, à lire des lettres à eux adressées, à découvrir une intimité, voire des secrets, qu'ils n'avaient pas jugé bon de révéler de leur vivant. Vider la maison de ses parents est une tâche ardue, "la plus lourde d'affects contradictoires". Les centaines d'objets auxquelles il faut trouver une destination, objets communs, ou plus précieux. L'auteur distingue l'héritage de la donation, soulignant combien celle-ci est préférable à l'héritage ("obtenir l'usage d'un bien sans qu'il nous ait été légué par le testateur"). Vider la maison de ses parents est un long parcours à travers leurs vies et la nôtre. C'est mesurer à chaque instant le poids du chagrin et de l'absence, et réviser, en quelque sorte, sa généalogie et son histoire. Toutes les histoires familiales n'ont pas la dimension tragique de celle de Lydia Flem. Il en est heureusement de plus paisible. Mais le parcours de l'orphelin, même tardif, est toujours marqué des mêmes symptômes : les souvenirs, dont il faut être capable de se protéger, pour pouvoir décider, la lourdeur (physique, au premier sens du terme), les choix presque impossibles à faire. Tout est définitif. On ne revient pas sur ce qui a été donné, vendu, jeté. Sauf si, comme l'auteur, on écrit un livre à partir de cette expérience unique. "Écrire captait le flot bouillonnant des affects". Et "toutes ces choses familières que nous avons aimées, un jour ne sont plus que vieilleries encombrantes. Il faut nous en séparer, joyeusement. Célébrer la victoire de la vie sur la mort".

 

06/08/2012

Et la Vierge attend toujours...

P1070373.JPG

05/08/2012

Citation

"Quand on est vieux, on a moins envie de claquer des portes, car on sent que la dernière va bientôt claquer sur vous, et qu'elle sera définitive. Chaque heure passée est une de moins dans le cercueil".

André Wilms, Libération, 31/07/12

04/08/2012

La nuit

Depuis peu, la nuit est silencieuse. J'ai toujours entendu le clocher égrener toutes les heures du jour et de la nuit. Beaucoup se plaignaient de ces bruyantes annonces nocturnes, toutes les heures, et même deux fois de suite. Mon bonheur, en retrouvant mes vieux murs, était de vivre les nuits en compagnie de ces sons profonds, répétés, qui scandaient le temps. Mes insomnies étaient habitées, il suffisait d'attendre, et de compter les coups sonores. C'est fini. Le clocher se tait à partir de 23 heures. On a attendu que les derniers vieux habitants meurent, ceux qui avaient entendu, comme moi, ces sons dès avant leur naissance, dans le ventre maternel. Eux disparus, les partisans de la modernité, des nuits éteintes, du silence, ont gagné. Je me demande seulement pourquoi ils supportent les mobylettes bruyantes, les poids lourds, et les petits bolides qui ravagent si bien les jours et les nuits. Je regrette les sons calmes, apaisants, du clocher, la nuit. J'ai perdu une scansion qui m'était constitutive.