17/07/2011
Archéologie (1)
C'est une photo surgie du néant. Une surprise. Un cadeau inattendu. Le cliché était là, dormant caché parmi des dizaines de plaques photographiques oubliées au grenier. Pour la plupart d'entre elles, j'en connaissais le tirage papier. Et puis celle-ci, inconnue. Que mon père n'avait pas jugé nécessaire de tirer. Il fallut, quelques décennies plus tard, une main soigneuse, attentive, pour qu'elle monte pour la première fois sur le papier sensible. Une vraie photo, qui fait renaître un monde non seulement disparu, normalement disparu par la vertu de la marche du temps, mais aussi une scène dont je n'imaginais pas qu'elle ait pu exister un jour. Je sais peu de choses de ma famille d'avant (avant ma naissance...). Je reconnais les personnages : grands-parents, tantes, cousine, mère, frère et soeurs nés si longtemps avant moi. C'est une scène de pique-nique, rustique, on voit le lac en arrière plan, il fait frisquet, tout le monde porte des manteaux, très logiquement je pense qu'ils sont venus à cet endroit dans la grande voiture de mon père. Le rendez-vous champêtre a été organisé, prévu, les activités des uns et des autres pour un temps suspendues, un moment de détente familiale. C'est une infime parcelle de la vie d'une famille de moi inconnue,même si c'est la mienne, vers 1929, sur les rives d'un lac de Savoie.
Je suis émue de les découvrir sur cette photographie, comme des rescapés d'une époque ensevelie, encore un peu vivants dans ma seule mémoire, par la grâce d'une plaque de verre.
12:24 Publié dans Avant | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
15/07/2011
J'aime
J'aime lire tard dans la nuit
écrire au petit matin
dessiner devant la fenêtre
cuisiner pour la famille
coudre des vêtements improbables
peindre (murs, portes, tableaux)
broder des motifs abstraits
regarder s'installer la lumière du matin
et aussi...
égrener les petits pois fraîchement cueillis
surveiller la confiture bouillonnante
consoler un enfant
marcher dans les bois
pleurer au cinéma dans le noir
ranger ma bibliothèque
visiter les églises romanes
les lampes (toutes les lampes)
le parfum de la canelle
(et même l'odeur du cambouis)
le bruit de la faux fendant l'herbe haute
(et les bruits disparus de la forge)
et plus que tout sentir le grain du papier sous mes doigts
09:12 Publié dans Fragments | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
14/07/2011
Petit Larousse
Un très vieux Petit Larousse, manipulé sans précautions par les enfants de la famille. Un peu dépenaillé, et pourtant conservé par les générations successives. Je pense que c'est plus par négligence que par intérêt réel. Quelques décennies plus tard, cette négligence me fait plaisir. Ces objets anodins permettent que le passé ne s'éteigne pas et nourrissent la mémoire.
11:10 Publié dans Je range mon grenier | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
Éloge de la vieillesse
Éloge de la vieillesse, de Hermann Hesse, Poche Biblio
Ce livre, bref dans sa forme, donne envie d'avoir une fin "harmonieuse".
"Tant que la mémoire veille, rien de ce qui se passe et de ce qui s'est passé ne se perd" (p.52), la mémoire comme une richesse, qui donne son sens à la vieillesse, ou plus exactement, lui donne sa dimension apaisante. "notre vie serait pitoyable... sans les trésors dont nous sommes détenteurs". Mais l'auteur est lucide et ne manque pas de souligner les effets pervers de la mémoire. "Le sentiment de tristesse qui naît de l'attachement à ce qui est perdu n'est pas bon et ne correspond pas au véritable sens de la vie". (p.75)
Les misères du corps ne sont pas passées sous silence, ni même édulcorées. C'est la force de ce livre de donner à voir la vieillesse comme une expérience inouïe, que la jeunesse ne peut même pas soupçonner. Et, dit-il, quand deux personnes âgées se rencontrent, elles ne devraient pas seulement se raconter leurs misères physiques, "mais aussi les expériences qui les ont ravies et réconfortées".
Tout est dit...
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