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30/07/2013

La couverture de Marie Janona

Il y avait autrefois une vieille femme qui brodait chaque jour en gardant son troupeau, quelques chèvres et pas plus de moutons. Elle utilisait des petits bouts de drap de laine, ces échantillons que les commerçants utilisaient autrefois pour passer leurs commandes, et qu'elle récupérait, sans doute grâce aux bonnes relations qu'elle entretenait avec la patronne des galeries farfouilletes du coin. Sur chaque bout de drap sombre (pas de fantaisie colorée dans ce genre d"article), elle brodait, sans dessin préalable, ce qu'elle avait sous les yeux, les fleurs des champs. Elle assemblait ensuite les morceaux au point d'épine, et peu à peu ce patchwork paysan devenait une couverture merveilleuse. Comment ces mains, déformées par les travaux des champs, pouvaient-elles être capables de tant de délicatesse ? Chaque fleur reconnaissable, exactement représentées. Elle n'emportait dans les champs que quelques aiguillées, connaissant à l'avance les couleurs dont elle aurait besoin. Pendant toute la belle saison, cette brodeuse solitaire savourait ce plaisir inouï, cette fantaisie créative, quelques heures volées au travail impitoyable de la ferme. La couverture a sans doute disparu, mitée, abîmée, car les choses que j'évoque remontent à plusieurs décennies. Marie Janona était pourtant assez fière de sa couverture et donnait les noms de chaque fleur représentée. Il y avait en elle une grande adresse manuelle et un sens aigu de l'observation. Mais son activité de brodeuse était peu connue dans son village. En tout cas, personne ne m'en a jamais parlé, ni de son vivant, ni après sa mort.

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03/07/2013

Vieille histoire

Vieille histoire répétée dans la famille. Dispute entre deux époux : le mari, menaçant, le bras levé pour frapper sa minuscule épouse "Ah! si ce n'était la crainte de Dieu !" et elle, petite mais prénommée Olympe, ce qui n'est pas rien, se redressant de toute sa petite taille, répondant :"Moi, ce n'est pas crainte de Dieu qui me retient, mais c'est la force qui me manque..."

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30/06/2013

Lectures anciennes

À la maison (quand je dis à la maison, j'évoque celle de mon enfance et ceux qui l'habitaient alors et qui ont presque tous disparus), on lisait le Reader's digest. C'est en lisant un article sur Marcel Cohen dans le Matricule des Anges (n° 144 si vous voulez tout savoir) que je retrouve ces mots, et le souvenir de la chose. Ce n'était pas, je crois, de la littérature de haute volée (mais pas de la drouille ?), mais j'aimais beaucoup lire ces résumés, ces extraits de livres, ont on ne connaissait ni le début ni la fin. C'était, déjà, une lecture fragmentaire, une lecture zapping avant la lettre. Les textes étaient variés et ce mélange (assez anglo-saxon, je crois, en tout cas international), sans doute pas destinés aux enfants, me plaisait beaucoup. Je ne sais pas si nous le recevions par abonnement ou si nous l'achetions de temps en temps. Et je ne me souviens pas si mes autorités supérieures (parents, frères et soeurs beaucoup plus âgés) m'empêchaient de lire ce qui n'était pas pour les jeunes lecteurs. Mais peut-être ces autorités, préoccupées par 1000 choses plus importantes, ne se penchaient pas sur mes lectures, ni sur quoi que ce soit d'ailleurs me concernant.

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31/05/2013

Paillasses

La lecture de "La plante compagne" de Pierre Lieutaghi (Actes Sud) ranime de vielles choses bien enfouies : je me souviens des paillasses des lits des jeunes enfants, faites de feuilles de maïs sèches, légères et bruissantes. On secouait ces matelas de fortune le matin pour leur redonner du gonflant; il s'en dégageait une légère odeur d'herbes fanées mêlées aux relents de pipi. Ces paillasses, finalement, matelas de pauvres, dans un temps de guerre ou d'immédiate après-guerre, étaient hygiéniques, car les feuillages en étaient souvent renouvelés. Mais elles n'étaient utilisées que pour les corps légers des petits enfants. Lieutaghi explique que l'amoncellement d'herbes sèches pour faire une couche a été une des plus ancienne utilisation du végétal. Lire Lieutaghi est un régal, pour qui s'intéresse à nos relations avec la terre depuis des temps immémoriaux.

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